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Toyen, poétesse innovante avant d’être peintresse

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© Anonyme, Toyen, 1930 (wikipedia.org)

Suzanne Valadon est remise au goût du jour dans un autre article en tant que peintresse et femme libre. Les différences entre les deux artistes ? Toyen ne se revendique pas tant peintresse que poétesse et elle avait été oubliée avant la récente exposition au Musée d’Art Moderne de la ville de Paris.

Clémentine Mercier, femme de lettres, considère entre autres constituée l’œuvre de Toyen de “Fruits-vulves, fleurs cerveaux et autres fauves haletants de désir”. L’objectif est d’explorer les frontières de la réalité.

Du 25 mars au 24 juillet, la rétrospective de l’Oeuvre de Toyen (1902 – 1980) s’installe au MAM (Musée d’Art Moderne) de la ville de Paris, après avoir voyagé à Prague et à Hambourg. Cent-cinquante œuvres sont présentées dans un parcours divisé en cinq parties. L’exposition est le fruit d’une collaboration dense entre Annie Le Brun, Anaëlle Gorgen-Lammer et Anna Pravdova.

Toyen, un nom d’artiste encore méconnu en France. Toute sa vie, Toyen a l’ambition d’interroger l’image et de donner forme à ce qui n’en a pas. Elle préfigure sans le savoir l’abstraction lyrique, trente ans avant que ce mouvement n’émerge en France. Elle constitue par ailleurs une artiste majeure dusurréalisme tchèque.

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© Toyen, Tous les éléments, 1950 (flickr)

Le Musée d’Art Moderne de la Ville de Paris et son homologue étatique

Deux musées d’art moderne sont créés respectivement par la l’Etat et par la ville de Paris, à l’occasion de l’exposition internationale des arts et techniques dans la vie moderne. L’Etat crée un premier Musée d’art moderne national en 1947 qui est transféré en centre Pompidou en 1977. Les élus de la capitale inaugurent en parallèle le Musée d’Art Moderne de la ville de Paris en 1961.

Renzo Piano, Richard Rogers et Gianfranco Franchini sont les architectes du Centre national d’art et de culture Georges-Pompidou. Il est inauguré en 1977 par le président Valéry Giscard d’Estaing.

Le Musée d’Art Moderne de la ville de Paris est situé entre les Champs-Elysées et la Tour Eiffel, dans le 15e arrondissement parisien. Il inclut dans sa collection un riche éventail d’œuvres, d’époques et d’artistes divers et variés, allant de l’art moderne jusqu’à l’art contemporain. Il faut compter dans sa collection permanente par exemple Picasso, Dufy, Modigliani, Derain, Picabia ou encore Chagall.

Sur la troisième image en partant de la gauche : salle sur la scène artistique allemande au Musée d’Art Moderne de la ville de Paris.

 

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    © Jean-Pierre Dalbéra, Le Centre Georges Pompidou (flickr)
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    © Page de l’Album officiel de l’Exposition internationale des Arts et des techniques appliqués à la vie moderne ; Paris, 1937 (wikipedia)
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    © Jean-Pierre Dalbéra, La salle sur la scène artistique allemande, 2014 (wikipedia commons)

Des débuts dignes de Toyen : rocambolesques

Toyen est une artiste majeure du surréalisme, à la trajectoire exceptionnelle, qui connaissait une relative notoriété de son temps.

Littéralement, Toyen pense à travers l’image. Elle est dotée de moyens plastiques étonnants, pourtant elle s’obstine à affirmer n’être pas peintresse. Elle a pu ainsi être comparée à Rimbaud : elle ne se veut pas plus peintresse que lui se voulait littérateur. La peinture est davantage pour Toyen un outil par lequel partir à la rencontre du monde, déceler ses secrets. Il s’agit d’une artiste libre et engagée qui ne cède devant rien. 

Née Marie Cerminova, très tôt elle montre une tendance à braver les interdits et à revendiquer sa voix lorsqu’elle peint sur les murs de son immeuble, enfant. En 1918, elle quitte sa famille et commence à fréquenter les milieux anarchistes et communistes. Elle s’inscrit à l’académie des Beaux-Arts de Prague mais ne suit pas l’enseignement de manière assidue…

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© Anonyme, Toyen, 1930 (wikipedia)

Elle se rend alors en Croatie. Elle y rencontre Jindrich Styrsky (1899-1942). Ils créent ensemble “l’artificialisme”, une forme d’hybridation entre la peinture et la poésie. A la fin des années 20, ce mouvement préfigure l’abstraction lyrique qui se développe plus tard en France dans les années 50.

Photographie : En 1925, Toyen s’installe à Paris avec Štyrský qu’elle a rencontré en Croatie. Ils créent ensemble un nouveau style qu’ils appellent « artificialisme ».

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© Anonyme, Photo de Jindrich Styrsky et Toyen, 1828 - 1929 (wikipedia)

Des innovations, en quête de donner corps à notre désir d’infini

Entre 1925 et 1929, le binôme fréquente beaucoup Paris et les surréalistes dont ils apprécient l’onirisme et la poésie. Pourtant, ils rejettent le mouvement comme appartenant déjà à d’autres. Ils désirent innover et fondent donc “l’artificialisme” depuis leur atelier de Montrouge où ils explorent, en précurseurs, la non-figuration. Ils écrivent même un manifeste ! Cependant, ils finissent par rejoindre le mouvement surréaliste en 1934, aux côtés de Paul Eluard et d’André Breton.

En 1939, Toyen, prise en étau par les totalitarismes, s’isole et le Groupe des surréalistes bascule dans la clandestinité. Toyen est recluse à Prague. Malgré la guerre, Toyen demeure active. Elle peint des tableaux de grands formats (Relâche), réalise des photo-poèmes et des livres-objets, où les mots et les dessins s’entremêlent. Finalement, elle n’arrête jamais ses recherches pour trouver un moyen de lier image, pensée et poésie. Elle connaît un désir sans fin d’exploration.

Photographie : Une femme aggripée à une barre au mur, dont le haut du corps est dissimulé par le vêtement qui retombe et dévoile la culotte. Quelle scène curieuse, qui plus qu’elle dépeint une tapette à mouches et un sac de papier vide reposant par terre.

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© Toyen, Relâche, 1943, huile sur toile, 110 x 55 cm (archives.org)

En savoir plus : 

  • “Rétrospective Toyen : artificialiste, surréaliste et éperdument insoumise” in Beaux-Arts Magazine, n°454, avril 2022
  • Toyen : une femme surréaliste (openedition.org)
  • “L’œil du commissaire. Toyen, l’écart absolu” (vidéo) : https://youtu.be/2KSKCX8AhBs